Yllis

Séparatisme (1)

“Ils veulent vivre entre eux et rejettent les institutions”, a dénoncé récemment le Président de la République, aux Mureaux.

J’étais presque heureux quand j’ai entendu cela. Le pouvoir politique allait enfin s’attaquer à ce qui mine le “pacte républicain” !

Ce séparatisme, dénoncé par Emmanuel Macron aux Mureaux en octobre 2020, “se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République, qui se traduit souvent par la constitution d’une contre-société” et ont “une volonté revendiquée, affichée, une organisation méthodique pour contrevenir aux lois de la République et créer un ordre parallèle”.

Car en effet, c’est vrai, il est clair que la fraction la plus fortunée de la population a fait sécession et vit selon ses propres normes et valeurs, dans ses propres quartiers protégés par des grilles et des vigiles.

Cette très haute bourgeoisie ne souhaite pas se voir imposer le droit commun et les structures du droit commun. Nous le voyons au niveau juridique, où grâce à ses moyens, elle échappe pour partie à la justice, ses enfants ont leurs propres écoles et non celle de la république. Elle a ses propres règles en matière fiscale (avec une évasion fiscale “légale” majeure en comparaison de ses revenus), en matière environnementale où il est prouvé que les 1 % des plus riches polluent 40 fois plus que les 30 % les plus pauvres, etc…

D’ailleurs, l’ONG Oxfam vient de publier un rapport intitulé « une économie au service du 1% »(2020), qui à sa manière dénonce aussi ce séparatisme. Il montre l’explosion des inégalités dans le monde. Selon les calculs d’Oxfam, 62 individus détiennent autant de richesses que les 3,5 milliards de personnes les plus pauvres. En cinq ans la fortune de ces 62 milliardaires a augmenté de 44 % quand les revenus des 3,5 milliards de pauvres baissaient de 41 % !

Et c’est écart est aussi vrai en France, où en décembre 2019 l’INSEE montrait que les 1 % les plus riches possèdent au moins 1 941 600 euros de patrimoine brut (quand les 10 % les plus modestes n’en possèdent que 3 800 au maximum). Je n’ai pas les chiffres concernant les 0,1 % des plus riches, qui sont les véritables maîtres de l’économie.

Mais… naïf que j’étais, ce n’est pas à ce séparatisme des très riches qu’Emmanuel Macron souhaite s’en prendre. Il reconnait d’ailleurs que sa définition ne s’applique qu’au “séparatisme islamique”.

Je ne discuterai pas dans cet article du bien fondé de cette notion de “séparatisme islamique”, de sa réalité, de la manoeuvre politique que cette notion recèle et de cette façon de stigmatiser une fraction importante des quartiers populaires, sous couvert de s’en prendre aux apprentis fascistes religieux. Comme s’il n’y avait pas de problème économique et social !

Il est pourtant clair que le séparatisme des ultra-riches face au reste de la population a des conséquences qui sont dramatiques pour toute la société.

Ce sont eux, les actionnaires des entreprises qui font des bénéfices, mais licencient ou ferment des sites. La seule logique étant de maintenir un taux de profit suffisant, si possible à deux chiffres, indépendamment des besoins de la population.

C’est ce fonctionnement de l’économie qui met de côté des millions de femmes et d’hommes en France et des milliards dans le monde, avec des conséquences délétères. C’est ce fonctionnement de l’économie qui détruit le vivant sur terre, accélère la transformation du climat.

Il est peut-être temps… en fait, il est même urgent, de mettre un terme à ce séparatisme qui existe entre une économie possédée par quelques uns, au service de quelques uns, et le fonctionnement d’une société qui répondrait aux besoins vitaux de l’humanité et à la préservation du vivant sur la Terre !

– Pascal

(et pour l’anecdote, je trouve cocasse de parler de séparatisme dans une ville populaire comme les Mureaux, quand on vit soi-même dans un château !)

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